PHILIP SAYCE : Influence (2014)
Bien que né au Pays de Galles, le dernier « guitar hero » en date a été élevé à Toronto, Canada. La Nouvelle France n’excellerait donc pas seulement dans la catégorie de la chanson francophone ? Ce n’est pas vraiment une découverte. Nous avions déjà été confrontés à l’immense talent et à la technique renversante de Jeff Healey, disparu malheureusement trop jeune. Philip Sayce a d’ailleurs tourné avec le prodige aveugle. Il a aussi fait une apparition remarquée au Crossroads Festival d’Eric Clapton. Notre jeune homme clame haut et fort ses influences (Stevie Ray Vaughan, Jeff Healey et surtout Hendrix) et tente de nous les présenter dans ce disque au titre évocateur. La part belle est faite à Jimi, le son est costaud et la technique ravageuse du Canadien en ravira plus d’un. Maintenant, tout cela suffit-il à créer un grand album ? Je ne suis pas particulièrement fana de « Tom Devil », un rock blues pyché/hardos au tempo médium sur lequel Philip nous montre ses influences hendrixiennes. Cependant, il faut bien avouer que le solo de guitare nous transporte dans le temps vers la fin des sixties. Le rock blues rapide « Out Of My Mind » n’apporte pas grand-chose, à part un solo de gratte extra terrestre. Je préfère « Sailin’ Shoes », un funky blues qui balance bien. Le solo de « I’m Going Home » fait dans la haute voltige et laisse perplexe. On se demande comment ce mec arrive à tirer de pareils sons de son instrument. Sa six cordes évoque franchement Jimi sur « Fade Into You », une ballade psychédélique. « Blues Ain’t Nothing But A Good Woman On Your Mind », un bon Texas blues, me parle plus. Nous avons droit à un super solo sonnant comme Stevie Ray sur « Couldn’t Stand The Weather » (effet chorus et wah wah). L’intro et le solo de « Green Power » rappellerait « Voodoo Chile » tandis que « Easy On The Eyes », un rock blues rapide, fait office de remplissage. « Evil Woman », encore sous influence hendrixienne, n’amène rien de flamboyant non plus et « Light’em Up », un blues rock mid tempo au riff lourdaud, sert de prétexte à un solo de gratte en délire. Par contre, je craque pour la reprise de « Better Days » de Graham Nash, une superbe ballade pop/rock qui monte en intensité tout au long du morceau, avec un solo final qui laisse parler la technique et le feeling mélangés et qui se termine à la tierce. « Triumph », un instrumental lent et planant, est aussi très agréable à écouter avec ses phrases de guitare à la Stevie Ray Vaughan (remember « Riviera Paradise »). Et puis, « Peace In The Valley », un slow bluesy, frappe fort également (on pourrait le comparer à la reprise de « Come Home For Christmas » par Johnny Winter). Le solo se révèle plein d’âme et de feeling avec des phrasés mélodiques et des triolets experts. Un régal ! Notre jeune canadien nous a donc concocté un disque rempli de solos démentiels, de tirés de cordes osés et de glissandos vertigineux. Mais a-t-il su éviter les pièges de la démonstration technique ? Je ferai une réponse de Normand : à chacun de juger ! Parmi les treize titres de cette galette, il y en a pour tous les goûts, alors… Et puis, qu’est-ce que vous avez contre les Normands ?
Olivier Aubry